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Texte Libre

      Ce blog est lié au site www.pourlecommunisme.com, rédigé par un militant du PCF, dans le but de publier plus rapidement des positions et informations liées aux sujets du site. Il est également devenu un blog de suivi (discontinu) de l'actualité du PCF, de réactions à divers sujets n'ayant pas leur place sur le site.

     www.pourlecommunisme.com est un site qui s'attaque directement aux critiques faites contre le communisme (millions de morts imputés à l'idéal communiste, faillite économique, etc...). Il ne fait la promotion d'aucun régime existant ou ayant existé par le passé, s'efforce de comprendre les faits et de proposer des pistes pour l'avenir.

     Vous êtes anticommuniste et voulez débarasser le monde d'un jeune fou qui, selon vous, risque de faucher à nouveau des millions de vies?

Vous êtes stalino-maoïste (pardon : marxiste-léniniste-pensée-Mao-Zedong) et voulez écraser la vermine révisionniste que je suis?

Vous voulez simplement parler du communisme?

Alors ce blog est pour vous.

 

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29 décembre 2009 2 29 /12 /décembre /2009 23:02


passnavigo.jpg
(petite illustration francilo-francilienne...)

Je tiens finalement à honorer ma promesse d’un article sur la gratuité des transports.

Je vais donner de suite ma position sur « Faut-il que les transports en communs (bus, trains, tramways, etc…) deviennent gratuits pour tous ?

Surprise : ma réponse est non.

Je suis donc en désaccord avec les camarades JC de Seine-Maritime qui militent pour des transports gratuits, ainsi qu’avec plusieurs villes qui ont mis en place cette gratuité (une vingtaine en France, dont Châteauroux, Compiègne, ou la ville PCF d’Aubagne).

Je sais qu’il y a beaucoup d’arguments tentants pour la gratuité des transports.

Les sirènes de la gratuité

D’abord, elle soulagerait les usagers à bas revenu. C’est évidemment un point intéressant, et l’on pourrait déjà y répondre, comme le font de nombreuses collectivités locales, par la gratuité pour certaines catégories d’actifs. Ainsi, la région Ile-de-France exonère les RMIstes ou encore les bénéficiaires de l’allocation Parent Isolé. La carte ImaginR dont ma fédération demande le demi-remboursement est aussi une mesure d’exonération sectorielle (pour les jeunes scolarisés). Mais ces mesures ont un défaut : lorsqu’on sort du RMI en trouvant un emploi, on perd une aide. Bien sûr, en soi, le coût de la perte de l’exonération n’est pas suffisant pour désinciter un RMIste à trouver un emploi. Mais si l’on cumule ces cas avec la perte d’autres subventions suite à la reprise d’un travail, surtout si celui-ci est faiblement rémunéré, alors travailler devient subitement moins intéressant. 

           Aussi, pour ma part, préférerais-je que la carte ImaginR soit étendue à tous les jeunes de moins de 26 ans, et pas seulement aux jeunes scolarisés, et qu’on prenne en compte les jeunes travailleurs. Puisque de toute façon, lorsqu’on fête son 26ème anniversaire, on ne peut pas choisir de rajeunir (…hélas). Même si j’estime que la baisse des coûts du transport serait souhaitable pour tous (mais entraînant une hausse des impôts), cela ne justifie pas la gratuité généralisée, pour les raisons que nous verrons plus bas.

Ensuite, la gratuité des transports favoriserait un déplacement plus écologique, au détriment de l’automobile individuelle. Je suis moi-même très partisan du recul de l’automobile, mais il n’est pas du tout évident que la gratuité entraîne une baisse de l’utilisation de la voiture au profit des transports en commun. Une étude de 2004 affirme que l’effet modal (c’est-à-dire l’effet sur le choix de la voiture ou des transports en communs) de la gratuité des transports publics est très peu visible, certainement très faible. En effet, il importe peu de savoir que les transports en commun sont gratuits, si de toute façon on estime que les lignes ne desservent pas efficacement le lieu que l’on veut rejoindre, si les bus sont lents, mal entretenus, en sous-capacité (ce qui ne s’arrangera pas avec une hausse de la fréquentation si le billet est gratuit). Si l’on constate un accroissement à court terme du nombre de gens qui prennent le bus, cela ne signifie pas forcément qu’il y a moins de gens transportés en automobile. Il peut tout simplement s’agir de piétons qui, maintenant que c’est gratuit, prennent le bus pour éviter d’user leur pied. L’intérêt écologique, économique et social de la mesure est alors discutable.

Les coûts de la gratuité

Ils se rencontrent à deux niveaux : la perte des recettes de billetterie (qui ne couvrent de toute façon pas grand-chose dans le coût réel des transports publics), qui ne sont pas compensées par la suppression des coûts de contrôle. Et ensuite d’autres coûts viendront de par la hausse du nombre de personnes utilisant les transports collectifs. C’est pour ne pas avoir prévu de réponse à ces coûts, et parce que l’effet de la gratuité sur l’encombrement routier n’était nullement prouvé, que le projet du parti suisse Les Communistes consistant à instaurer la gratuité à Genève fut repoussé en par votation en 2008.

Si l’on veut réellement une substitution des automobiles par des bus ou des trams, l’important est avant tout d’améliorer le réseau en créant de nouvelles lignes, plus d’unité de transport, et de meilleure qualité. En Ile-de-France, le chantier évident, et qui s’étire en longueur depuis des années, est la création d’une véritable rocade ferroviaire (ou de tramway) dans la petite couronne, évitant de devoir passer par Paris pour se rendre d’un point à un autre de la couronne.

Ensuite, les raisons qui font que je suis opposé à une gratuité totale, c’est que le prix du transport peut représenter un pouvoir tant pour l’usager que pour le salarié de l’entreprise de transport. Je m’explique : pour les usagers, je vous invite à (re)lire l’article que j’ai publié il y a quelques semaines sur les arguments contre les privatisations. Dans cet article, je proposais une réforme de la tarification des services d’une entreprise comme la SNCF, avec une part fixe et une part libre dans les prix des billets de train. Ce qui permettrait aux usagers de manifester leur mécontentement en ne payant plus la part libre (la SNCF pouvant répondre par une limitation du service – lisez l’article si vous êtes sceptiques).

Mais aussi, le fait que les transports soient payants permet aussi d’envisager la grève de la tarification. C’est une idée qui revient couramment à chaque vague de grèves, et qui consisterait à ce que les conducteurs ne cessent pas le travail lorsqu’ils font grève, mais à ce que les contrôleurs se retrouvent empêchés de travailler. Et que le train soit de fait gratuit pendant la durée de la grève. Générant une forte sympathie du public, cette manière de faire grève n’en soulèverait pas moins des objections. Que faire si les usagers utilisent massivement des abonnements mensuels ? Annoncer une grève sur un mois. Et si les contrôleurs tiennent absolument à travailler ? Et bien les conducteurs font une grève classique ? Et si c’est illégal de faire la grève de la tarification ? La législation peut évoluer : il y a 150 ans, la grève tout court était illégale. Ce mode de contestation me semble au final réalisable et pertinent. Mais il impose en revanche que, en temps normal, le transport collectif soit payant.

D’autres propositions

Si l’on veut réduire généralement les coûts de transports et réduire la place de l’automobile et les émissions de CO2, il n’y en a pas moins deux autres propositions que je peux faire.

Sur le plan du coût des transports, on pourrait instaurer le coût dégressif du billet ou du forfait. Au premier billet, vous payez un prix X, vous compostez une carte annuelle, puis au second billet, ladite carte déjà compostée vous permet de payer moins que X, etc…plus votre carte indique une forte fréquence, plus le prix baisse. Ce serait une manière de favoriser l’usager régulier (donc le jeune scolarisé qui se rend tous les jours dans le même établissement, ou le chercheur d’emploi qui multiplie les entretiens) par rapport au voyageur occasionnel. Ce qui répondrait à l’un des problèmes que pose la gratuité : les touristes de passage dans la ville en profiteraient sans la financer par des impôts. La limite de cette proposition de prix dégressif est qu’elle permettrait à des malotrus de multiplier les achats pour avoir des billets à des prix très intéressants qu’ils pourraient revendre au marché noir…limite qui, me semble-t-il, sera facilement cernable par le fait de n’autoriser qu’une baisse de prix par jour, ou de ne laisser la possibilité d’acheter que quelques billets à prix réduits dans une journée, etc…

L’autre chantier, beaucoup plus important et déterminant, serait de diminuer la fréquence et la longueur physique des voyages, à commencer par les trajets professionnels. L’un des principaux leviers peut être tout simplement l’échange d’emplois. C’est-à-dire amener tous les salariés à publier (sous anonymat) leur lieu, la nature et les conditions de leur travail. Et ainsi amener celui qui vit dans la ville A et travaille dans la ville B à proposer à celui qui vit dans B et fait le même type de poste dans A à faire l’échange. Un autre levier peut être la distribution au plus grand nombre de personnes de bons de covoiturage. Et permettre à chaque personne qui proposerait un transport groupé avec son véhicule de recevoir lesdits bons en tant que rémunération, échangeables contre de véritables euros auprès de l’administration. Ce serait sans doute plus pertinent que d’avoir une organisation étatique du covoiturage, puisque l’on serait sûr que les véhicules mis à disposition seraient effectivement utiles, les particuliers ne se séparant de leurs bons que contre une prestation réelle. Un projet qui nécessiterait des impôts, mais en l’échange d’une véritable économie pour les particuliers.

 

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15 décembre 2009 2 15 /12 /décembre /2009 23:12

transports-gratuits.jpg

Cessons un peu de parler de la Nation, de la religion du Prophète, des minarets de ce que vous savez. Parlons à nouveau des luttes réelles.

Les luttes, me direz-vous....mais quoi précisément ? Et bien déjà par l'information. La première action à disposition du militant, où qu'il soit, quelque soit son appartenance professionnelle.

Je vous invite notamment à regarder, et faire diffuser autour de vous le DVD de la trilogie de Jean-Robert Viallet, La Mise à Mort du Travail, passée récemment sur France Télévisions (sur France 3).

Ce documentaire analyse la violence des relations de travail dans l'axe Destruction / Aliénation / Dépossession.

Cet ordre peut sembler inverse de celui que l'on aurait voulu dans le cadre d'une approche apocalyptique du capitalisme managérial. L'intelligence de cette série est justement de partir de cas individuels déplorables (salariés montés les uns contre les autres, licenciés par des méthodes pathétiques d'accusations de vol, violences verbales répétées, destruction de la santé physique et morale), pour aller ensuite remonter les strates. Derrière le salarié jetable, il y a le manager dressé et dresseur, le coacheur qui n'a même pas besoin de stupéfiants pour distiller un discours halluciné, et derrière cela il y a une déconnexion totale entre les propriétaires de l'entreprise et le travailleur, des critères de gestion standardisés, appliqués d'un secteur à l'autre...à tel point que le modèle de gestion du travail peut devenir...un entraîneur de football.

N"hésitez donc pas à
découvrir ce document.
Si vous habitez sur les Hauts-de-Seine, n'hésitez pas à joindre la fédération pour en savoir plus, par exemple via mjcf92nord@hotmail.fr .

Une autre priorité des jeunes communistes est la lutte pour la réduction du coût des transports.

Les JC de Seine-Maritime demandent la gratuité.

Ceux du 92 sont plus modestes, en demandant la réduction de 50% du coût de la carte ImaginR. Cette carte, qui permet aux lycéens, étudiants, travailleurs en alternance, bref aux jeunes scolarisés ayant jusqu'à 26 ans, de circuler en Ile-de-France à prix plus bas, coûte tout de même plusieurs centaines d'euros à l'année. Les départements de Seine-Saint-Denis (conseil général PCF jusqu'à 2008) et du Val-de-Marne (conseil général PCF) ont réduit de moitié son coût. Le département des Hauts-de-Seine, le plus riche de France, s'y refuse.

Vous pouvez prendre davantage connaissance du sujet via
cette page, et le blog du conseiller général PCF Patrick Alexanian .

Je creuserai davantage cette question de la gratuité des transports d'ici au milieu de la semaine prochaine.

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28 octobre 2009 3 28 /10 /octobre /2009 01:45

Maintenant, le gros dossier : la question de l'efficacité qualité / prix des entreprises publiques, et des solutions pour l'améliorer sans nullement toucher à la propriété publique, ni même au monopole. On y distingue la partie "arguments qui peuvent être employés dans une discussion" des propositions, la deuxième étant trop complexe pour être lancée dans une discussion courante.


 

Argument n°6 : « Le problème des surcoûts n’est pas une question de propriété publique ou privée, mais une question de responsabilisation de l’entreprise »

Nous sommes habitués à un modèle d’entreprise publique : ses dirigeants sont directement nommés par le gouvernement, c’est à lui que l’entreprise rend des comptes, si tant est que le gouvernement y tienne, et le seul pouvoir des citoyens de base est d’élire un autre gouvernement. En supposant bien sûr que la gestion des entreprises publiques soit un jour le thème central d’une élection présidentielle.

D’où les idées que ressassent les libéraux, qui sont que

-          l’entreprise publique n’est de fait jamais sensible à la satisfaction du client (ou alors seulement lorsque le service est très défaillant, au cours d’une grève massive par exemple) ;

-          que quand bien même le mécontentement des usagers serait pris en compte, ce serait sous la pression médiatique et donc sans lendemains ;

-          que les entreprises ne sont pas vraiment sensibles à leur résultat financier, peuvent supporter des déficits récurrents, espérant l’aide de l’état au final ;

-          que, partant sur la série précédente, les entreprises publiques ne songent que peu à rationaliser leurs coûts, embauchent massivement sans licencier lorsque leurs besoins sont dépassés, que les compétences sont peu mises à profit, la productivité est basse, etc…

Et tout cela génèrerait le surcoût des entreprises publiques par rapport à une gestion privée. Le fait que les entreprises publiques n’aient pas de dividendes à verser (en fait elles en versent à l’Etat, mais celui-ci pourrait les en dispenser, ce que ne fera pas durablement un actionnaire privé) ou encore le fait qu’un monopole public n’ait pas besoin de démarchage publicitaire (alors qu’EDF ou la SNCF en font…), tout cela est loin de pouvoir compenser ce surcoût du monopole public.

Je ne discuterais pas non plus longtemps la réalité des affirmations précédentes sur les monopoles publics : les entreprises publiques ne sont pas figées en réalité, elles sont progressivement réformées et savent utiliser le droit privé dès qu’elles peuvent (par l’utilisation massive de contrats précaires par exemple, ou le fait de proposer à des salariés de travailler dans leurs filiales de droit privé, comme le fait la SNCF par exemple). Les comptes d’entreprises telles que la Poste ou la SNCF se sont rapprochés de l’équilibre, mais avec l’aide de l’état : la SNCF, qui prétend ne pas recevoir de subventions d’Etat, a de nombreux contrats de service public avec des collectivités. Vu qu’elle est en monopole pour remporter ces contrats, on se doute que le prix doit être confortable pour la SNCF…).

Mais surtout, ce mode de fonctionnement de l’entreprise est loin d’être le seul possible. On peut très bien recréer les contraintes de gestion obligeant une entreprise à l’efficacité (c’est-à-dire l’optimisation du rapport qualité du service / dépense effectuée) sans toucher à son caractère public ni même à son monopole.

La première voie pour y arriver est de se rappeler qu’en tant qu’entreprises publiques, la SNCF, EDF et La Poste appartiennent à chacun de nous. C’est-à-dire que nous devrions tous pouvoir nous considérer comme ses sociétaires (1). Et plutôt que de dépendre du gouvernement, la présidence des entreprises publique devrait être élue –ou du moins révocable- par les sociétaires.

En clair, cela veut dire qu’une fois par an au moins, lorsque la presse révèlerait le bilan de la SNCF, sous la forme d’un épais déficit et d’une qualité médiocre de la desserte, si plusieurs centaines de milliers de personnes en expriment le souhait, la direction gicle. Il serait peu réaliste de faire voter 48 millions de français majeurs sur la gestion de leurs entreprises publiques tous les ans. Le simple pouvoir de révocation par demande d’une minorité suffisante serait déjà une puissante contrainte pour la gestion desdites entreprises.

                Mais encore faut-il que les citoyens/usagers/clients/contribuables se manifestent, et ne se contentent pas de hausser les épaules en lisant les mauvais bulletins de notes de l’entreprise, en se disant qu’ils n’y changeront rien de toute façon. La responsabilisation de l’entreprise repose sur la sensibilisation de l’usager/citoyen/client et sa capacité de réaction. Si le quidam de base ne ressent pas sur sa chair nue les effets d’une mauvaise gestion et d’un mauvais service (2), et surtout s’il n’a pas les moyens de réagir vite avant que d’autres soucis quotidiens ne l’en aient détourné, alors rien ne marchera.

                D’où les propositions ci-dessous. La première est relativement simple, et peut être lancée dans une discussion, même hargneuse, contre un partisan des privatisations. La seconde ne l’est pas, et ne peut être avancée que dans un dialogue détendu.

Proposition n°1 : dividende négatif et droit de renvoi des citoyens-sociétaires

                La première proposition serait directe, à défaut d’être populaire. Il s’agit tout simplement de faire payer directement une fraction du déficit d’une entreprise publique par chaque ménage, sous la forme d’un dividende négatif. C’est-à-dire : chaque année, si déficit il y a, une fraction de celui-ci est partagée entre tous les ménages, et une facture leur parvient, annonçant à l’heureux sociétaire qu’il est joyeusement invité à payer 20 euros pour combler le déficit des entreprises publiques. En modulant ce « dividende » en fonction de la tranche d’imposition sur le revenu du contribuable en question, bien sûr.

                Cela ne coûtera pas forcément plus cher à la population. Ce déficit qui serait payé directement, c’est de l’endettement en moins, ou de la subvention d’Etat en moins, donc moins d’impôt au final.

                Mais surtout, l’effet principal de cette mesure, c’est son défaut apparent : elle en énervera plus d’un, et amènera à ce que, chaque année, plusieurs centaines de milliers de personnes transmettent une demande de démission de la présidence de telle ou telle entreprise. On pourra fixer le barème fatal à 200.000, 500.000 ou un million de mécontents exprimés pour faire tomber la sanction.

                Pour qu’une véritable démocratie des citoyens-sociétaires existe, ce droit au mécontentement ne suffira pas. Si l’entreprise décide une politique de déficit volontaire pour assumer un service de qualité à prix bas, les sociétaires doivent également avoir la possibilité d’exprimer une demande de maintien de l’actuelle direction. Et c’est la différence entre le nombre de demandes de démission et de maintien qui décidera du sort des sortants. Parallèlement à cela, de véritables syndicats d’usagers, et pas seulement des associations « d’usagers en colère » doivent voir le jour, et mener le dialogue avec les entreprises publiques, lançant si besoin est des mots d’ordre pour exiger (ou non) la décapitation de l’entreprise.

Proposition n°2 : prix à partie libre

                Cette proposition est plus complexe est plus originale, et elle est à manier avec précaution, et surtout pas dans une discussion tendue. Son principe est pourtant simple : pour donner à chaque usager/client un pouvoir de pression contre une entreprise publique en monopole, on décide que les prix seront en deux parties : un prix minimum, et on est libre de payer plus. Si vous arrêtez là la présentation de l’idée, vous verrez vos interlocuteurs hilares (j’en ai fait l’expérience), puisqu’il est évident que personne ne paiera plus que le minimum.

                Mais l’idée est plus complexe que ça. Je l’avais déjà évoquée à la fin de l’article contre la privatisation de la Poste. Voici en quoi elle consiste :

première étape : chaque année, une autorité extérieure à l’entreprise publique (mettons la SNCF) se réunit. Elle regroupe des usagers, des salariés, des parlementaires, des syndicats d’entreprise, enfin bref, tous ceux qui sont concernés par le fonctionnement de la SNCF, mais personne de la SNCF même, ni du gouvernement. Cette autorité va fixer deux cahiers des charges à la SNCF. Je dis bien deux cahiers des charges. Le premier sera un cahier des charges minimal, c’est-à-dire le service minimum en dessous du quel la SNCF ne peut pas descendre. C’est le niveau de service où il y a tout juste assez de trains pour que le pays puisse relativement fonctionner. Et un  cahier des charges souhaité, c’est-à-dire les objectifs de service public les plus élevés possibles que la SNCF puisse remplir. On souhaite bien sûr que la SNCF s’approche le plus possible du second cahier des charges, mais le premier aura une utilité.

En sus de cela, l’autorité extérieure fixe des prix minimaux pour les principales ventes de la SNCF. Ces prix répondent à une règle : ils doivent être si bas que, même en pratiquant le cahier des charges minimal, et même en intégrant toutes les subventions de l’Etat pour l’année à venir, la SNCF serait en déficit à la fin de l’année si ces prix étaient pratiqués. Cela veut dire que même si l’état rajoute des subventions l’année suivante, les prix seront encore rabaissés. Et on peut même aller jusqu’au cas théorique extrême, c’est-à-dire les prix négatifs : on paie les gens pour prendre le train. Ce ne sera jamais fait bien sûr, cette situation absurde n’est invoquée que pour rappeler à l’Etat qu’il ne peut pas prendre intégralement en charge les frais de la SNCF.

-          Deuxième étape : maintenant, tout au long de l’année, les usagers sont libres de ne payer que ces prix minimaux pour leurs billets, mais ils sont invités à payer plus. Et il semble évident qu’ils ne vont payer que le minimum. Sauf que la SNCF, si elle constate cela, est libre de rabaisser son service au niveau du cahier des charges minimal, c’est-à-dire de supprimer (uniformément sur le territoire, pour respecter l’égalité du service public) un grand nombre de trains. Par exemple, si tous les malins s’amusent à payer le minimum, ils s’apercevront rapidement qu’un train sur deux, voire moins, roulera, voire même qu’il n’y en aura plus de disponible pour eux. Et aucune grève ne sera en cause.

Vous aurez donc compris le fondement de cette proposition : c’est la rationalité collective. C’est-à-dire un jeu où le comportement qui semble évident pour une personne (je ne paie que ce que je suis contraint de payer) ne l’est plus si une sanction du comportement collectif menace. Il faut donc raisonner sur la base du « que se passe-t-il si beaucoup de gens font comme moi ? ».

Précisons encore une chose : la SNCF est responsabilisée sur son déficit auprès des citoyens que nous sommes, par le biais du dividende négatif (cf. proposition n°1). Les deux propositions se combinent donc. Si la direction de la SNCF réalise un déficit trop important, elle ne passe pas l’année.

                                On va alors avoir quatre situations possibles, représentées sur le graphe suivant :

 

Situation 1 : celle qui semble évidente : tout le monde paie le minimum, et la SNCF applique le service minimal en permanence. Cette situation est désastreuse pour les particuliers comme pour l’économie, mais aussi pour la SNCF qui de toute façon réalise un déficit, étant donné la bassesse des prix minimaux (cf. plus haut).

Situation 2 : quand bien même les particuliers seraient « généreux » et paieraient plus que le minimum, si la SNCF offre un mauvais service, cette générosité s’évaporera en moins de deux.

Situation 3 : Si la SNCF est de bonne volonté mais que personne ne paie plus que le minimum, elle réduit son service, afin de réduire son déficit.

                Bref, les situations 2 et 3 renvoient à la situation 1, qui ne satisfait personne.

Les usagers vont alors devoir s’organiser, via des syndicats d’usagers, pour négocier avec la SNCF des engagements concrets en vue de se rapprocher du cahier des charges souhaité évoqué plus haut, ou tout simplement pour avoir un service correct. Après accord, lesdits syndicats et l’entreprise communiquent dessus pour lancer le mot d’ordre pour que les usagers paient plus que le minimum, et que l’équilibre financier soit atteint pour la SNCF. Si les particuliers jouent le jeu et pas la SNCF, situation 2. Dans le cas inverse, situation 3, et au final situation 1.

                Et l’on doit, par cette négociation, et la rationalité de chacun, arriver à progresser vers la situation 4 : la SNCF pratique un service qui s’améliore, elle réduit ses coûts au minimum puisque la tendance de tous les clients sera de revenir au prix minimum, et que tout surcoût dévoilé par la presse pourra les convaincre de le faire.

                Bien sûr, ce système laisse quelques questions : d’abord, il y aura toujours des « passagers clandestins », c’est-à-dire une minorité de gens qui profiteront de ce que les autres paient plus pour continuer à payer le minimum. Sauf qu’ils ne peuvent être trop nombreux, sinon la SNCF réduit son service. Mais ils existeront quand même. Cela peut sembler dommageable moralement, mais c’est le prix à payer pour un système qui permet à chacun d’exprimer sa satisfaction ou insatisfaction de l’entreprise en monopole public à chaque achat. On pourrait sinon imaginer des systèmes de prix versés collectivement par des syndicats d’usagers, ou autre solution utilisant la délégation. Mais même des représentants élus par les usagers ne transmettraient qu’imparfaitement et avec retard l’avis des usagers. L’existence de ces passagers clandestins peut même être une justice sociale si ce sont les plus pauvres qui paient le moins (cependant, ce résultat n’est pas assuré en soi, il peut y avoir des pauvres généreux et des moins pauvres radins). Il faut aussi que toute réduction du service touche toutes les stations sans en pénaliser une plus que d’autres, sans quoi, dans certains secteurs géographiques du réseau ferroviaire, les clients se sentiraient davantage sous pression pour payer plus qu’ailleurs.

                Ensuite, il est évident qu’une personne qui ne prend le train qu’une ou deux fois par an peut, à la limite, se moquer de la qualité du service, tant qu’il a son billet, et ne paiera donc que le minimum, tandis que l’usager régulier de la SNCF sera plus concerné par la qualité du service. C’est pour cela que le système de prix libres ne concernera que les clients qui auront déjà réalisé un ou deux achats dans l’année. Le prix des premiers billets doit alors être fixé par l’autorité extérieure à la SNCF.

                Plus encore, pour que la pédagogie se fasse, il faut que la menace soit crédible. Donc, dans les premiers mois où ce système prendrait effet, qu’une direction kamikaze applique tout de suite la réduction du service, pour faire comprendre aux clients avares qu’on ne plaisante pas dans ce jeu SNCF/usagers. Les usagers-sociétaires pouvant faire des demandes de démission de ladite direction tant pour des motifs de déficits que pour la qualité du service, il sera certain que cette direction ne verra pas les années suivantes de l’expérience.

(1)                            des sociétaires sont un peu comme des actionnaires, sauf qu’ils votent dans leur société au principe de « une personne une voix » et non sur le « une action une voix » des actionnaires ; on peut devenir sociétaire sans apporter des capitaux propres à l’entreprise, mais par exemple en devenant un de ses cotisants (comme dans une société mutuelle d’assurance).

(2)                            Il n’y a pas trop de soucis à se faire sur ce dernier point : lorsque les trains sont en retard ou absents, que le courrier n’arrive pas, ou que l’électricité est coupée, en général l’usager le ressent et n’est pas très satisfait. Sauf s’il habite dans le Larzac, porte une veste en laine cachée par une longue tignasse et fait ses propres yaourts.


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27 octobre 2009 2 27 /10 /octobre /2009 00:02

Après un premier article un peut rabat-joie, remontons-nous le moral avec la deuxième partie.

Continuons avec  les arguments que l’on peut utiliser :

Argument n°3 : « La propriété publique est le seul cadre admissible pour pratiquer la vente à perte généralisée dans l’intérêt de l’économie »

Nous avons vu que la notion de service public ne justifie pas en soi la propriété publique de certaines entreprises. Le véritable intérêt des entreprises publiques, c’est :

-          D’une part la certitude que certaines industries n’appartiendront pas à des capitaux étrangers, donc potentiellement à des intérêts étrangers, comme par exemple des entreprises d’armement. J’écris cet argument à titre purement théorique, car aujourd’hui, d’une part nous avons un risque de guerre faible, et nous sommes intégrés à une alliance qui dépasse largement la France (l’OTAN) ;

 

-          Mais surtout la possibilité de mener politique d’intérêt national en pratiquant des prix n’ayant rien à voir avec les « prix du marché » (c’est-à-dire les prix qui auraient cours si on livrait l’activité de l’entreprise au marché concurrentiel), mais des prix fixés dans l’intérêt de l’économie dans son ensemble, le plus souvent en les fixant à un niveau bas. Par exemple, le train, le courrier, l’électricité pourraient être vendus à perte, non pas sur un secteur jugé non rentable (les trois grand-mères du hameau de Lozère) mais sur l’ensemble du pays. Cette action est largement pertinente dans les secteurs cités car tout le monde, particuliers comme entreprises, a besoin tous les jours de transports, de courrier, d’électricité. Ce serait donc une aide permanente à l’économie, pouvant générer un surplus de croissance, et donc d’impôts, et c’est donc une politique rationnelle pour l’économie nationale comme pour l’Etat.

Une entreprise privée ne pourrait pas assumer cette politique. Ou alors elle devrait recevoir une subvention de l’Etat sur toutes ses activités. Imaginons cependant une entreprise privée à qui on déléguerait ce service avec obligation de tout vendre à pertes. Autrement dit, cette entreprise « privée » vivrait complètement aux crochets de l’argent public. Certes, on pourrait fixer des règles : que l’Etat verse une subvention en bloc, fixée pour une durée assez longue (plusieurs années par exemple). Et pendant ce temps, l’entreprise privée pourrait optimiser sa gestion, maintenir ses coûts au plus bas, et proposer des prix (inférieurs au coût de revient) attractifs. Ainsi, même si elle aurait besoin de la subvention pour exercer, l’entreprise privée devrait assurer son bénéfice par une gestion efficace.

Sauf qu’en réalité, de par la variation du trafic, des coûts, de la croissance économique (donc du pouvoir d’achat des particuliers et des trésoreries des entreprises), l’Etat ne pourra se permettre de fixer une subvention pour longtemps, et devra intervenir régulièrement pour modifier la subvention. Alors, l’entreprise privée qui serait délégataire du service aura pour principal intérêt de faire pression (ou du lobbying) pour augmenter cette subvention, et en tirer l’essentiel de la croissance de son bénéfice. Elle pourra prendre exemple sur le lobby des agriculteurs nourris aux subventions de la Politique Agricole Commune (exemple de secteur ‘privé ‘ vivant de fonds publics) ou utiliser des relais politiques (à l’image de l’héritier des entreprises de Dassault, lui-même parlementaire, et qui vote donc le revenu de son entreprise, qui a pour client essentiel l’Etat français). Les dividendes d’une telle entreprise n’auraient aucun fondement, à part (peut-être), le rôle de réducteur de coûts (en partant du principe – théorique- qu’une entreprise privée réduira au minimum les sureffectifs et les dépenses inutiles dans son activité), point que nous aborderons dans l’argument n°5.

Argument n°4 : « La privatisation n’est pas nécessaire pour obtenir un financement, fut-il privé»

Il est en effet surprenant de toujours entendre l’argument selon lequel une entreprise publique ne peut vivre que des aides de l’état, que l’absence d’entrée de capital privé bloque son développement, qu’il faut donc ouvrir le capital (donc privatiser), la seule alternative étant l’endettement. Il est vrai qu’il y a une différence de nature entre un achat de parts de capital par des actionnaires et un emprunt fait sur des fonds privés : l’actionnariat est une finance désintermédiée (on n’a pas à payer, entre le créancier et l’entreprise, les frais de fonctionnements et les bénéfices de l’intermédiaire qu’est la banque), la valeur du capital achetée par l’actionnaire diminue si l’entreprise va mal (alors qu’une somme empruntée reste fixe, le taux d’intérêt pouvant être mobile en revanche), les actionnaires peuvent accepter un dividende nul en cas de mauvais résultats (alors que les intérêts versés aux créanciers ne fonctionnent pas ainsi). On peut comprendre qu’une entreprise préfère avoir des actionnaires plutôt qu’un emprunt.

Cependant, un actionnaire, cela reste une charge de dividendes à fournir. Et qu’on ne doit surtout pas multiplier les cas où le dividende sera nul, sinon on ne trouvera plus d’actionnaires ! Les entreprises publiques, même celles qui restent (grosso modo EDF, SNCF, La Poste…) demeurent des poids lourds économiques. L’Etat négocie des emprunts aux taux les plus bas du marché (puisque le remboursement est quasi-assuré). Pourquoi les entreprises publiques ne peuvent-elles pas s’endetter collectivement, à un taux faible (plus bas qu’un emprunt EDF, puisque les entreprises publiques dans leur ensemble sont plus solides encore) ? Elles pourraient le faire au travers d’une structure qui apporterait son financement aux entreprises en leur re-prêtant sans majorer le taux d’intérêt. Certes, cela crée une dette. Mais l’important n’est-il pas de savoir quel est le coût de cette dette en termes de charges d’intérêts ? Et s’il est plus bas, à long terme, que le coût du versement de dividendes, pourquoi ce financement serait-il pire que « l’ouverture de capital » au privé ?

En disant cela, nous avons mis de côté le financement de l’Etat pour le développement de l’entreprise publique, en partant sur le principe (favorable aux libéraux donc) que l’Etat ne peut se permettre d’accroître son aide. Or, si la vente à perte pratiquée par l’entreprise publique permet comme on l’a suggéré une croissance plus forte (les entreprises peuvent faire voyager leurs salariés plus fréquemment et plus loin grâce à des prix de billets de trains très bas, elles peuvent faire plus de courrier, consommer plus d’électricité – la préoccupation écologique mise à part), alors elle peut représenter un gain pour l’Etat. Plus de croissance fait généralement plus d’impôts pour l’Etat, d’où le gain en question. Il servira à combler le déficit organisé de l’entreprise publique (ce qui rend cohérente la politique de vente à perte), mais aussi, s’il est suffisamment élevé, de financer son développement.

Argument n°5 : « Le statut protecteur de l’emploi pour un salarié d’entreprise publique (si du moins il est titulaire !) n’est pas un privilège, mais une couverture contre le risque de licenciement politique »

Je l’avais expliqué dans les tout premiers articles du blog, il y a trois ans bientôt : l’Etat ne pouvant faire faillite (enfin pas facilement), il peut se permettre de se débarrasser d’agents, mêmes doués, pour des motifs d’opposition politique. Le statut des fonctionnaires évite de se retrouver avec une vague de licenciement après chaque alternance politique. Que l’on veuille introduire des contraintes de résultats dans une administration, une entreprise publique, c’est possible. On peut utiliser les incitations au résultat collectif (c’est-à-dire primer ou mettre un malus  à un service entier), mettre en retrait de son poste un agent en sureffectif et lui laisser plusieurs choix de réaffectations, etc… Mais le licenciement individuel pour critères « d’inefficacité » peut toujours être suspect dans la sphère administrative/ des entreprises en monopole.

Et le fait de transférer l’activité à des prestataires privés ne changera pas grand-chose à l’affaire : au contraire, la répression syndicale prendra de plus belle. Les nouveaux employeurs peuvent améliorer le salaire de certains agents pour acheter leur assentiment au renvoie d’autres. Et, ayant l’Etat pour principal client, une entreprise privée sous-traitante de l’activité de l’Etat peut très bien recevoir des consignes politiques.

Historiquement, les privatisations ont toujours un aspect politique, ne serait-ce que dans l’optique de détruire les syndicats, comme au début des années 80 dans le conflit opposant Thatcher aux mineurs britanniques.

 

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25 octobre 2009 7 25 /10 /octobre /2009 22:35

Encore un article super long, pour changer. Donc je le publierai en trois parties.

  Cet article doit servir de source et de proposition à la fois, sur un thème que les communistes ne peuvent bien sûr pas ignorer. En participant à la votation citoyenne contre le changement de statut de La Poste, à laquelle deux millions de personnes ont participé, j’ai pu remarquer plusieurs faits.

                D’abord, la plupart des passants semblent ne pas avoir envie de se plaindre du service fournie par l’entreprise publique postale.           

                Ensuite, parmi le grand nombre de ceux qui ont pris les tracts, la plupart semblaient avoir un avis positif sur notre vote, et donc contre la privatisation. Il y a eu quelques cas de gens qui clamaient qu’ils étaient pour la privatisation, mais ça ne semble pas être une exigence répandue.

Ensuite, en conversant avec ceux qui s’arrêtent pour prendre le tract, on a parfois des avis très remontés contre le service du courrier, et aussi celui de la Banque Postale. Ainsi, une dame m’a décrit pendant dix minutes comment la Banque Postale la volait en lui prélevant des agios sans justification pendant une année entière avant qu’elle ne ferme son compte. Mais elle est finalement allée voter contre le changement de statut de La Poste.

Il existe une littérature considérable sur les abus, les gaspillages, ou encore la médiocrité de certains services rendus par les entreprises publiques. Le mécontentement reste cependant minoritaire, une entreprise publique telle qu’EDF restant parmi celles qui ont la meilleure image auprès des français (ce qui est un peu moins le cas de La Poste, qui garde une image positive auprès de la majorité des français, tandis que celle de la SNCF monte et chute au gré des vagues de grèves). Nous avons donc la chance d’être dans un pays où les usagers font relativement bien la distinction entre des fautes des entreprises publiques et l’existence même de ces entreprises. Il n’en reste pas moins que, jusqu’à cette votation citoyenne (qui reste une manifestation très tranquille), il n’y a pas eu de protestation généralisée contre les privatisations. Et que la justification de l’existence d’entreprises publiques n’est pas assurée pour tous, d’où la nécessité d’un article dans la catégorie « Luttes ». Imaginez, en effet, ce que cela donne si en plein tractage, vous vous retrouvez coincé par un argumentaire favorable à la privatisation, construit, subtil, a priori convaincant ? Le militant qui part tôt le matin (ou rentre tard le soir) distribuer des tracts fait peut-être preuve d’abnégation, il n’en est pas pour autant buté et insensible aux arguments adverses.

Chaque discussion de comptoir peut être l’occasion d’une escarmouche entre partisans et adversaires et entreprises publiques. Paraphrasant Ho Chi Minh, le front se situe là où se trouve l’ennemi, c’est-à-dire partout.

L’article va comprendre des arguments à opposer ou à ne pas opposer aux partisans des privatisations. Mais aussi des propositions, car il est évident que du fait des déficits récurrents qu’ont connu les entreprises publiques, les défauts de services et les surcoûts qui leur sont reprochés, on ne peut être partisan de maintenir ces entreprises telles qu’elles existent.

Ces arguments sont destinés à convaincre –ou du moins à mettre en doute- aussi bien des communistes que des non-communistes. Donc on ne trouvera pas l’argument fondamental du communisme, à savoir que tout revenu du capital étant un vol du travail (même si Marx préférait le terme exploitation qu’il jugeait plus rigoureux), donc tout accroissement de la propriété privée signifie l’expansion du domaine de l’exploitation. Cependant, dans une discussion de rue, cet argument sera difficile à placer, car il est relativement long à exposer. Mais surtout, cet argument ne fera effet que si le montant des revenus du capital est élevé par rapport à la valeur ajoutée produite par les salariés. Et là, tout dépend des sensibilités : pour moi, 5 à 10% de revenu du capital, c’es trop (tout ce qui est plus que 0% aussi en fait). Un non-communiste pourra trouver cela tolérable, surtout si, croit-il, la privatisation amenait en revanche une baisse de prix et un meilleur service. C’est donc directement sur ces sujets qu’il faut mener la conversation.

Commençons par les arguments qu’il ne faut pas utiliser :

Argument n°1 : « La privatisation va mener à la fin du service public, c’est-à-dire du service de qualité égal pour tous au même prix : plus de lignes de train non rentables, moins de bureaux de poste, moins de lignes de bus, etc…» 

Il n’y aura plus de facteur pour aller distribuer le courrier aux trois grand-mères qui habitent dans un hameau perdu de Lozère (et qui font un peu chier le monde en habitant là) ! La question du service public a largement été traitée par les libéraux. Rappelons d’abord la définition du service public : un service égal, sans discrimination géographique ni de condition des usagers, et sans discrimination de prix, le tout financé par une péréquation des prix (les secteurs où le service est rentable financent les secteurs où il ne l’est pas. Le service public n’est pas synonyme d’entreprise publique, et les libéraux ont raison de rappeler ce point. Une entreprise privée ayant une délégation de service public peut se voir imposer, lorsqu’elle répond à un appel d’offres, un cahier des charges, incluant l’obligation de servir des usagers même si ce n’est pas rentable. La collectivité (l’Etat, la région, la commune) va financer ensuite une subvention à l’entreprise pour combler la perte que l’entreprise privée ferait en desservant ces usagers « non-rentables ». N’importe quel libéral un peu conséquent vous fera cette parade. C’est notamment ce qui se passe dans les opérations de privatisation des transports ferroviaires, tramway ou bus : la collectivité examine régulièrement le respect du cahier des charges par l’entreprise, avant de relancer un appel d’offres, en cas d’insatisfaction, où si une entreprise prétendant à un coût plus bas au même niveau de service se présente.

Il y a une réaction immédiate que l’on peut avoir : mais cette subvention publique représente un (sur)coût, qui pourrait être diminué dans le cas d’un service assuré par une entreprise publique, qui pourrait utiliser ses gains sur des zones rentables pour financer le reste du service, tandis qu’une entreprise privée va utiliser une partie de ces gains pour distribuer des bénéfices, sa raison d’être ultime ! Réaction parfaitement juste : théoriquement, une entreprise publique a un avantage sur une entreprise privée : à supposer qu’elles aient toutes deux exactement les mêmes coûts, l’entreprise publique n’a pas l’obligation de verser des profits, ce qui devrait l’amener à des investissements plus élevés ou des prix plus bas qu’une entreprise privée. On passe donc à la question cruciale des prix.

Argument n°2 : « De par la recherche de profit maximal pour les actionnaires, l’entreprise privée va faire monter les prix ! »

Exposé devant un libéral, cet argument paraîtra surréaliste : il vous expliquera que dans la plupart des cas, c’est la privatisation et la mise en concurrence qui font baisser les prix. On citera à l’avenant le cas de la privatisation des télécoms (en mettant très souvent sous silence les gains de productivité dû aux évolutions technologiques, sur la téléphonie mobile surtout, qui peuvent expliquer également des baisses de coûts), ou encore de la circulation aérienne. L’origine des tarifs élevés que les monopoles publics sont accusés de pratiquer est double :

-          La situation de monopole : qu’il existe ou non des surcoûts dans la production (j’entends par surcoûts les sureffectifs, les achats inutiles, les dédoublements d’administration et de services…), une entreprise qui n’a pas de concurrent serait sans contrainte pour imposer des prix élevés, et ce quand bien même elle en arrive à réduire le nombre de ventes, la maximisation de la recette étant le seul critère ;

-          L’existence de surcoûts, évoqués plus haut, permis justement par le fait que l’entreprise ne souffre d’aucun risque de faillite. Ces surcoûts peuvent non seulement pousser à des prix plus élevés encore que ceux qu’amène la situation de monopole, mais ils peuvent surtout faire que, même en monopole, l’entreprise soit en déficit.

Je n’ai pas à moi seul la compétence et les chiffres pour dire si oui ou non les privatisations ont tenu leurs promesses en termes de prix, ou du moins si elles les ont tenu sur le long terme, si la concurrence seule explique les baisses de prix, etc… Il faut s’attaquer à l’idée que seules la concurrence et la privatisation mèneront à mettre les entreprises sous l’obligation de pratiquer le coût minimum pour un service maximum (en supposant bien sûr que le service d’une entreprise privée et concurrentielle soit bien de qualité).

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6 septembre 2009 7 06 /09 /septembre /2009 22:19

Ayant réalisé que les luttes concrètes représentaient une part trop faible des articles publiés sur mon blog, et que la rentrée était aussi celle des luttes, abordons le sujet chaud du moment : la lutte contre la privatisation de La Poste.




Etant sur un blog PCF, prenons connaissance de la position du parti :

http://www.pcf.fr/spip.php?article3074&var_recherche=la%20poste

 

Que se passe-t-il exactement ?

 

En 2011, de part la transposition d’une directive européenne sur la concurrence, le monopole de la Poste, qui ne concernait déjà plus que les envois de moins de 50 grammes, va être aboli. En plus de cela, afin de faciliter les partenariats et les financements futurs, le rapport sur l’avenir de la Poste de Décembre 2008 propose de faire passer son statut de celui d’EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial) à celui de Société Anonyme.

 http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/084000771/0000.pdf


Qu’est-ce au fond que le problème de la Poste ? Un problème de mathématiques.

C’est le problème qui consiste à assurer une présence sur tout le territoire, à éviter un temps d’attente trop long à l’usager … tout en ne faisant pas de pertes. Cela me rappelle immédiatement la thématique des files d’attentes qui est un chapitre de l’enseignement des probabilités, en faculté de mathématiques, statistiques, ou en école d’ingénieur. Le temps d’attente étant formalisable avec des lois mathématiques (dépendant de la fréquence des arrivées d’usagers et du temps de traitement de leurs demandes), il s’agit d’organiser l’entreprise postale de sorte à ce que l’attente moyenne soit faible et que l’attente maximale soit limitée. L’attente de l’usager vivant en campagne reculée pouvant être assimilée au temps qu’il lui faut pour rejoindre un bureau de poste ou obtenir la délivrance de son courrier par le facteur.

 

Le plus vaste réseau d’Europe

 

Les points de poste, justement, étaient au nombre de 17000 dans le rapport susmentionné, dont 14500 relèvent d’une obligation de service public (avec la fameuse règle selon laquelle au maximum 10% de la population d’un département doit se situer à 5 km ou plus d’un bureau de poste). 14 000 de ces points sont effectivement des bureaux de poste, le reste étant constitué d’agences communales postales (intégrés à une mairie) ou un relais de poste confié à un commerçant. Théoriquement, le service est le même, ce qui n’est pas l’avis des rédacteurs SUD-PTT de ce tract de 2005

 (http://a_sylvie.club.fr/Decouvertes/images/LAPOSTEEXPL.pdf , voir la page 3).

 

Notons cependant que quand François Loos déclarait en 2005 : " Aujourd'hui près de 2000 agences postales communales et plus de 600 relais poste proposent la quasi-totalité de l'offre de La Poste ", il voulait peut-être parler de l’activité en volume, pas en nombre de tâches distinctes…quoique les affranchissements et les envois de recommandés, qui figurent selon SUD-PTT au nombre des options indisponibles hors bureaux de poste, ne sont sans doute pas une part infinitésimale de l’activité postale ! Ayant moi-même été temporairement ouvrier de La Poste, je peux en témoigner…

 

Sur cette question des bureaux de poste, leur nombre, bien supérieur à celui de n’importe quel de nos voisins pris isolément, est dû à un pays plus vaste, un nombre de communes bien plus élevé qu’ailleurs, et beaucoup de points isolés. Ce qui aboutit à ce que nombre de bureaux de postes seraient en fait sous-actifs. C’est l’argument qui avait été évoqué dès 2003, lorsque déjà Jean-Paul Delevoye, alors ministre de la Fonction publique, avait évoqué la fermeture de 6500 bureaux de postes. Et cet article de 2004 d’un site libéral

 (http://www.libres.org/francais/dossiers/service_public/reforme_poste_a2_4104.htm) enfonce le clou : « Sait-on que 1 522 points de contacts (bureaux de plein exercice ou annexes) sont ouverts moins de 30 minutes par jour. 1080 bureaux sont ouverts entre 30 minutes et une heure. 1134 entre 1 heure et 2 heures. 1277 entre 2 et 3 heures. 1493 entre 3 et 4 heures, etc. ? Le beau service public ! ».  On est là en plein dans le problème mathématique : maintenir un guichet partout pour éviter le risque de défaillance du service ou de surattente, c’est aussi risquer que le guichet en question soit inactif pendant la majorité du temps.

 

La Poste, sous-productive ?

 

La Poste est aussi décrite comme sous-productive par rapport à ses voisins européens. Un rapport public la plaçait déjà à 60% environ de la productivité (mesurée en chiffres d’affaires par agent) des opérateurs historiques allemand (DPWN) ou hollandais (TPG) il y a dix ans de cela (http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/034000622/0000.pdf). Différences ce « productivité » qu’on retrouvera comme argument sur nombre de sites de droite, mais qui en soit ne désignent pas grand-chose, car :

-          La Poste étant soit en monopole (sur les plis de moins de 50 grammes) ou en opérateur historique, la contrainte de la concurrence, et surtout la concurrence étrangère, joue encore peu, donc les prix français n’ont pas (encore) de raison de s’aligner sur les prix allemands ou néerlandais ;

-          La densité de population n’est évidemment pas comparable entre la France et l’Allemagne (qui est au triple de la densité française), et encore moins avec les Pays-Bas (450 habitants au kilomètre carré).

Pour tenir compte de cette différence de densité, prenons plutôt l’exemple de la Suède : la poste de ce pays avait un monopole jusqu’en 1993, et la proportion du courrier distribué dans les 24 heures était de 95% en cette année (…d’après le site libéral déjà cité). Ce fait milite donc, n’en déplaise à l’auteur de l’article, pour l’idée qu’une poste publique et en monopole peut être efficace, même dans un pays à la population éparse…

La sous-productivité relative de La Poste ne relève donc pas que de la géographie française : dans le rapport de Décembre 2008, plusieurs retards dans l’automatisation sont relevés, comme par exemple, page 8, le séquençage du courrier à livrer, qui se fait encore trop souvent à la main en France, quand il a été automatisé chez nos voisins.

            On ne peut bien sûr pas parler de la situation de l’activité postale sans savoir que le volume de courrier papier baisse, du fait de l’utilisation de plus en plus massive du courrier électronique. Mais il faut aussi savoir également que le courrier des particuliers ne représente qu’une minorité de l’activité de La Poste, loin derrière les missives des entreprises, qui tentent de passer de plus en plus au courrier dématérialisé. Ce qui n’améliorera pas la situation financière de la Poste, celle-ci, avec 1,3 Milliards d’euros de résultat Net, ayant relativement peu de marges pour financer ses investissements.

 

Investissements et financements

 

            Les investissements, parlons-en. Pour combattre l’un des principaux reproches fait à la Poste, à savoir le temps d’attente trop long (estimé à 7,8 voire dix minutes selon les années en moyenne), l’entreprise a mis en place plusieurs plans de modernisation des bureaux. Ce qui fait hurler encore du côté de SUD, pour qui le principal investissement à faire, ce sont des créations de guichets et d’emplois nouveaux (http://www.sudptt.org/IMG/pdf/commCTA.pdf). Nos camarades de la section PCF de Paris15ème voient dans les investissements de La Poste de nouveaux prétextes de désorganisation des bureaux de poste, afin d’accélérer le processus de privatisation (http://pcf-paris15.over-blog.com/article-34870952.html).

            Sur ce point, je crains que mes camarades n’aillent vite en besogne. Car il n’est pas faux que des progrès dans le temps d’attente soient possible sans pour autant augmenter le nombre de guichets. Par exemple, en spécialisant les guichets et les personnels dans les bureaux de forte affluence, en séparant les files envois et retraits de courriers/opérations financières/retraits d’allocations, l’attente des usagers venus pour leur courrier a pu considérablement diminuer. De plus, il faut aussi poser la question des horaires : beaucoup de bureaux de poste sont ouverts aux heures où la plupart des gens travaillent, poussant ici les usagers à se rendre au bureau le samedi matin…L’ouverture des bureaux de poste à des horaires différents, les soirs de semaine par exemple, peut diminuer le phénomène. La Poste a aussi à moderniser son système informatique, et supporte tout une série de coûts pour moderniser ses centres de tris, bureaux et systèmes informatiques.

            Le coût d’une série d’investissements programmés sur la période 2009-2012 est évaluée dans le rapport de Décembre 2008 est estimé, page 30, a entre 7,3 et 9 milliards d’euros, quand La Poste prétend pouvoir débloquer 900 millions d’euros pour s’autofinancer, soit, abattements fiscaux inclus, un besoin de financement de 2,7 milliards d’euros minimum d’ici 2012.

            Par ces temps de crise, il n’est pas question, selon la commission Ailleret (rédactrice dudit rapport) de recourir à un financement privé, et le refus de la privatisation est donné en début du rapport. Ce seront donc l’Etat et la caisse des dépôts et des consignations qui paieront. Mais apparaît déjà la proposition, reprise depuis par le gouvernement, du passage de La Poste au statut de société anonyme. Le besoin de financements futurs, que les rédacteurs du rapport espèrent privés (page 34 du rapport), voire l’échange de participations avec d’autres entreprises postales (sur l’exemple des postes danoise et suédoise), sont utilisés pour justifier le passage au statut de Société Anonyme (SA). Le prétexte du financement des investissements de La Poste, qui compte encore –pour combien de temps ?- dans son aile la Banque Postale, est fallacieux, et les camarades parisiens ont raison de citer le milliard d’euros que la Poste consacre au rachat de la banque Palatine, ou les milliards d’euros versés par le gouvernement au renflouement des banques privées depuis 2008.

 

Conclusions personnelles

 

1)      En tant que communiste, il est évident que le caractère public de La Poste n’est négociable sous aucun prétexte. Et le passage au statut de société anonyme, outre qu’il ne se justifie pas économiquement, ne ferait qu’ouvrir la voie à la privatisation ;

2)      Cependant, la défense de la propriété publique de La Poste ne permet pas de reléguer à un horizon plus lointain la lutte contre ses défauts de services : temps d’attente, de livraison, mais aussi parfois perte (ou même vol selon certains usagers) de courrier. Ce qui m’amène dans deux voies :

 

a.       Premièrement, l’entreprise doit mener à bien sa politique d’investissements de modernisation, sans forcément que l’on y voit un piège préparant la privatisation. La rationalisation du service aux usagers est un impératif qui ne se discute pas plus que le refus de la privatisation. Le parti avait déjà soutenu la grève du 23 Septembre 2008, et les prochaines dates d’actions seront relayées soit sur ce blog, soit sur d’autres blogs PCF (par exemple ceux de Paris 15ème, 5ème ou 14ème).
http://pcf-paris15.over-blog.com/
http://pcf5.over-blog.fr 
http://pcf-paris14.over-blog.org

Un référendum anti-privatisation aura lieu jusqu'au 3 Octobre, organisé par plusieurs partis, dont le PS et le PCF.
Certains camarades jugent l’initiative futile, politicienne. Ce n’est pas mon avis : je trouve juste que le plus grand nombre de citoyens s’expriment contre ce projet, et pas que l’on se repose uniquement sur l’action des salariés de La Poste. Ensuite, que cette action n’ait pas de fondement légal ne devrait pas poser problème pour des révolutionnaires, n’est-ce pas ? Je pense donc participer à cette consultation et invite le lecteur à le faire;

 

b.      Il faut, si l’entreprise devait à nouveau être en monopole (si un gouvernement de gauche le rétablissait), ou du moins rester en quasi-monopole de par son statut d’opérateur historique, donner un moyen de contestation à l’usager, que l’on pourrait également appliquer à la SNCF ou à EDF. Pour ma part, je verrais d’un bon œil la mise en place de tarifs à partie libre : on paie pour chaque service ou achat à l’entreprise monopoliste un prix fixé par une entité extérieure à l’entreprise, et on est invité à payer plus si on le souhaite. Cette partie libre serait le prix versé en reconnaissance de l’effort fait par l’entreprise pour améliorer la qualité de son service (rapidité de la délivrance du courrier, propreté et ponctualité des trains, absence de coupures d’électricité…). Si personne ne paie de part libre, on ne pourra s’étonner que le service soit médiocre. Cette part libre serait sans doute moins souvent payée par les usagers modestes, ce qui serait un peu plus juste socialement ;

 

c.       En dernier lieu, je vais être beaucoup plus polémique. Sur le fond, je pense que les libéraux n’ont pas tort de pointer la faible activité de nombreux bureaux de poste. Mais le refus de leur suppression est dû à une attitude guère surprenante en France, venant du refus de voir les petits villages se dépeupler du fait de « la disparition des services publics ». Si le service public est un devoir de l’Etat envers le citoyen, ce dernier peut tout de même avoir le devoir, envers la communauté nationale, de ne pas compliquer excessivement l’accomplissement du service public, par exemple en choisissant de vivre (et de demeurer) dans un coin reculé. En 1999 (date du dernier recensement, 21 000 des 36000 communes de France ne réunissaient que 4.7 millions d’habitants (soit beaucoup plus que le nombre d’agriculteurs, on ne peut donc même pas justifier cette ruralité par l'existence du monde agricole), soit 230 habitants par commune en moyenne (et 8% des habitants de la métropole). Est-il vraiment scandaleux de remplacer des bureaux par des points postaux, même si tous les services n’y sont pas disponibles, pour des administrés qui, de par leur lieu de résidence, compliquent également le travail des médecins, pompiers, réparateurs et secours en général ? Que cela plaise ou non, la modernité, c’est l’urbanisation. Sans elle, pas d’industrie, pas de progrès scientifique, et pas de service public moderne. La France a déjà lourdement payé son attachement à la ruralité : celle-ci s’était accompagnée d’une faible natalité au XIXème (causée par la préférence des paysans pour l’enfant unique, pour ne pas partager la terre, tandis que les prolétaires anglais ou allemands faisaient des familles nombreuses), qui nous a renvoyés au rang de nation de second ordre, notamment face à l’Allemagne, nous désavantageant gravement au cours des deux guerres mondiales. C’est pour cela que la passion française pour le monde rural, son caractère « sacré », et l’acharnement à défendre le « petit village de notre enfance » a tendance à me courir un peu…

 

Je précise une chose : lorsque je ne suis pas à Colombes, je réside dans un village vendéen de 800 habitants. Il n’y a qu’une boîte aux lettres, pas de bureau de poste à moins de cinq kilomètres. Je ne me plains de rien.

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2 juillet 2009 4 02 /07 /juillet /2009 03:17

Pour changer de l’article précédent, parlons un peu d’une lutte réelle. Hier matin de très bonne heure, je me suis rendu à la Résidence Universitaire Jean Zay d’Antony (RUA). Construite en 1954-1955, c’est une des plus grandes résidences universitaires d’Ile-de-France, que le Conseil Général des Hauts-de-Seine (présidé par Patrick Devedjian) souhaite faire en partie détruire. Au programme : destruction des 550 logements étudiants du bâtiment C de ladite résidence. La Communauté d’Agglomération des Hauts-de-Bièvre (CAHB) veut acquérir le terrain et le Conseil Général des Hauts-de-Seine veut entamer la démolition dans les plus brefs délais.

Il y avait donc, dès 7 heures du matin, un rassemblement de (selon mon décompte) environ 80 personnes, dont des membres de l’AARUA (Association des Amis de la Résidence Universitaire d’Antony, http://sauvonsjeanzay.blogspot.com/2009/06/la-residence-universitaire-dantony-jean.html ), de syndicats étudiants, de Jeudi Noir (association dénonçant la pénurie de logements).

Le but : créer une chaîne humaine devant l’entrée du bâtiment C pour empêcher une entreprise de construction de venir murer des chambres étudiantes.

Et effectivement, il était là, dès l’aube, ce camion chargé de matériaux prêts à l’emploi. Et la chaîne aussi. En termes de « syndicats étudiants », de fait : que de sympathiques UNEF-istes. Et des slogans gentillets du style :

« Notre Cité U on l’aime,

Et on va la garder !

Si Devedjian s’en mêle,

On va s’mobiliser ! »

Même pas d’injures ou de menaces, tout se perd. Quand je pense que le jour où j’avais rencontré Monsieur Devedjian à Colombes, j’avais pensé, en lui serrant la main, à lui demander de passer le bonjour à Occident… D’une manière générale, le mouvement de protection de la RUA semble avoir une tonalité très PS-UNEF (même si le PCF a également signé l’appel à « Donner un avenir à la RUA »). Il faut cependant tenir compte du fait que c’est souvent la seule opposition disponible à la droite dans de nombreuses villes des Hauts-de-Seine, hors de l’axe Nanterre-Colombes-Gennevilliers, Vanves-Malakoff ou encore Bagneux.

Plus sérieusement, l’intérêt de ma présence était davantage de m’informer, et d’interroger les membres de l’AARUA.

Les prétentions du Conseil Général sont que les 550 logements en question sont vétustes, trop petits (10 m²), et que pour 10 logements détruits ce seraient 12 qui seront reconstruits. La réhabilitation du bâtiment C serait trop chère (budget estimé par le Conseil Général à 66 millions d’euros, soit autant que la valeur du bâtiment lui-même paraît-t-il).

Sur ce blog de soutien à la mairie d’Antony, vous pouvez voire également un argumentaire pro-destruction :

http://www.antonypourtous.fr/?p=36

Le budget de la réhabilitation est ici estimé à 40 millions d’euros, la résidence serait une concentration de gauchistes (l’argumentation est donc loin d’être dénuée de « l’idéologie » reprochée aux adversaires de la destruction) et compterait en fait peu d’étudiants (mais quels habitants alors ? Et en quoi est-ce une raison de le détruire ?).

A cela les militants qui m’ont répondu, dont un architecte de formation, m’ont dit :

-          Des crédits pour la réhabilitation du bâtiment ont été proposés, notamment sous le gouvernement Jospin, depuis des années, et n’ont jamais été utilisés par le CROUS ;

-          Le bâtiment vaut plus que 66 millions d’euros, et sa destruction et la reconstruction d’autres sites vaudraient plus cher encore ;

-          Devant l’ampleur de la pénurie de logements, il est absurde de détruire des logements, furent-ils de 9 m², pour n’en construire que 20% de plus, à supposer qu’ils soient construits (ce qui, selon la présidente de l’AARUA, n’aurait été entamé que pour les logements de l’Ecole Normale Supérieure de Fontenay-aux-Roses). Ce qu’il faut c’est d’abord l’extension du parc étudiant et la réhabilitation de ce qui existe ;

-          Les logements sont certes petits mais sont offerts à de faibles loyers, autour de 137 euros. Là encore, ce sont des prétentions de l’AARUA, je n’en ai pas la preuve ;

-          Sur le plan du bâtiment lui-même, son délabrement serait celui d’une aile en particulier, dans laquelle se seraient attardés les caméras du Conseil Général, réhabilitable, tandis que le reste du bâtiment en serait sauf ;

-          Le bâtiment C devrait être sauvegardé en raison d’un intérêt architectural, ce qui m’a semblé beaucoup plus contestable : le bâtiment est tout ce qu’il y a de plus commun et assez monolithique. Les risques en termes de sécurité seraient faibles (je ne dis pas nul car le risque zéro n’existe pas).

Mais sur le fond, je suis plutôt en accord avec l’idée que le problème n’est pas tant dans « 40 millions d’euros pour construire ou pour réhabiliter des logements ? », mais dans le fait que ces fonds sont notoirement insuffisants (tout comme l’étaient, ceci dit, les fonds accordés par le gouvernement Jospin ou la région PS Ile-de-France, qui débloquait au début des années 2000 la maigre somme de 2 millions d’euros pour des travaux de réfection). Et que le choix de la destruction de logements me semble incongru.

Le président de la CAHB (Georges Siffredi) et le Conseil Général proposent de nouveaux logements qui seraient dispersés en petites unités « à taille humaine ». Bien pratique pour empêcher la naissance de mouvements étudiants, cette idée rendrait plus difficile le travail en groupe des étudiants, selon les dires de mes interlocuteurs de cette mâtinée.

Pour l’instant, si le murage de chambres n’a pas eu lieu, ce n’est que partie remise : des manœuvres d’intimidation des locataires auraient déjà lieu (de la part du CROUS ?), en incitant ceux-ci à retrouver au plus vite un logement dans une autre résidence, sous peine de se retrouver sans toit à la prochaine rentrée universitaire…



Pour suivre le mouvement : http://sauvonsjeanzay.blogspot.com/

Vendredi 3 Juillet:
Libération parle également de l'affaire : http://www.liberation.fr/societe/0101577746-la-cite-u-jean-zay-entre-renovation-et-demolition
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7 avril 2009 2 07 /04 /avril /2009 00:15
Puisque je parlais dans mon précédent article du journal des JC des Hauts-de-Seine qui reparaîtra bientôt, voici une proposition d'article de ma part. Je ne suis pas sûr qu'il passe, en tout cas de cette longueur, donc je le publie au préalable sur ce blog :


Anti-Gréviste:
Ah je te tiens, gréviste de retour de manif ! N'as-tu pas honte de saboter l'économie nationale en pleine crise?

Gréviste: …En temps de croissance, tu nous interdirais de faire grève pour ne pas casser la croissance ! ...Voie toutes ces usines qui tournent à demi-régimes et qui imposent le chômage technique aux travailleurs : la grève n'est pour rien dans la récession, et des capacités de production, on en a rarement eu autant.

Anti-Gréviste: Mais à quoi sert donc votre mouvement? Le gouvernement a déjà lancé un plan de relance, laissez-le agir!

Gréviste: Tu parles! Un plan de 26 Milliards d'euros, dont près de la moitié ne sont que des remboursements de crédit que l'État devait de toute façon aux entreprises ! Une fois de plus, l'État sort le discours du soutien aux entreprises comme il soutient les banques, c'est-à-dire y compris aux plus boiteuses. C'est pourtant officiel : nous sommes en surproduction*, les prix décélèrent*, le cours du pétrole baisse*, l'État peut et doit relancer la consommation!

Anti-Gréviste: Encore des hausses de salaires pour la fonction publique! Pensez-vous aux salariés du secteur privé? En augmentant le SMIC, vous aggraverez le chômage!

Gréviste: C'est sûr qu'il est plus difficile de trouver un emploi si l'on fait exploser le SMIC, mais rassure-toi, je ne suis pas du NPA, je ne veux pas le SMIC à 2000 nets pour demain. Cependant tous les travailleurs ne sont pas touchés de la même façon: pendant que les intérimaires et les salariés de l'industrie sont en première ligne*, de grandes entreprises et leurs personnels restent à l'abri. Il faut un nouveau transfert de revenus entre entreprises : imposer la contribution d'une société aux salaires d'une autre, faire revenir les dividendes de grands groupes vers les salaires des PME, ce ne serait que justice.

Anti-Gréviste: ...Et ainsi faire financer tous les canards boiteux de France et de Navarre par les entreprises performantes !

Gréviste : Il y a une infinité de solutions à tester, jamais deux choix seulement. Oblige les groupes les plus riches de France (les quelques centaines qui contrôlent de près ou de loin la moitié de notre économie) à soutenir les salaires des plus précaires, laisse leur seulement le choix des entreprises à soutenir: s'ils supportent des boîtes branlantes, ils assumeront leurs faillites! Et ce serait encore une avancée vers la mutualisation des salaires!

Anti-Gréviste : Avec tout ce que les entreprises paient en charges sociales...!

Gréviste: Avec tout ce que les salariés paient en cotisations sociales !

Anti-Gréviste: Mais c'est du communisme !

Gréviste: ...Et ce n'est qu'un début !


* Note de conjoncture, INSEE, 19 Mars 2009

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30 mars 2009 1 30 /03 /mars /2009 23:27



Je poste ce qui sera l'unique article du mois de Mars pour signaler quelques changements, et justifier près de six semaines d'absence.

Alors en effet, que de sujets manqués depuis un mois, entre la grève guadeloupéenne, puis martiniquaise, le plan de relance du gouvernement, le Front de gauche, etc... sans parler des sujets auxquels je pense depuis des mois, ou des sujets de fond qui me préoccuppent depuis peu et qui sont bien éloignés de nos soucis quotidiens...

Sujets non abordés pour cause de temps vaillamment occupé à divers projets personnels ainsi qu'au militantisme politique. Ainsi, je signale que les Jeunesses Communistes des Hauts-de-Seine relanceront bientôt leur publication d'un journal, que je n'y serai pas pour rien, et que cela repeuplera les colonnes de ce blog.

Ensuite parce que la plupart des réactions que j'ai eues sur l'actualité récente ont déjà été données dans de précédents articles. Sur le cas de la Guadeloupe, île que je connais très peu, je n'ai pas voulu m'avancer outre mesure. J'ai juste ressenti un défaut de solidarité personnelle avec les revendications du Lyannaj Kont Pwofitasyon (LKP), notamment la hausse des salaires de 200 euros, non pas pour elles-mêmes, mais plutôt par crainte que cela ne renforce, en métropole, un mot d'ordre simpliste de hausse générale des salaires. Ne vous méprenez pas: je ne suis bien sûr pas contre la hausse des salaires, mais pas en décrétant une montée du SMIC net de X centaines d'euros, rendant inemployables toujours plus de chômeurs, et risquant de relancer l'inflation, tandis que les dividendes versées à leurs actionnaires par des entreprises qui paient déjà leurs salariés au-dessus du SMIC continueraient de dormir tranquille. Dans un article (sur ce blog) d'Avril ou Mars 2007, intitulé "Augmenter le SMIC, impossible?", j'exposai une idée d'augmentation des salaires financées par des contributions "libres" entre entreprises ("libres" non pas au sens où les entreprises fortunées seraient libres de ne pas donner, mais où le destinataire du don est choisi par le donateur), afin de retransférer de la masse salariale des grandes entreprises vers les PME.

En Guadeloupe, de par la nature très monopoliste de l'économie, la revendication de la hausse des salaires et de la baisse des prix peut avoir plus de sens, puisqu'il est plus facile de contrôler les prix de quelques distributeurs (voire un seul comme Total pour l'essence) que de policer les prix dans un marché réellement concurrentiel. Mais cette situation peut aussi, à l'inverse, annihiler les hausses de salaires, l'absence de concurrence permettant aux monopolistes d'augmenter leurs prix juste avant que l'accord sur la baisse des prix ne prenne effet (si l'on m'oblige à baisser mes prix de 20% d'ici deux semaines, j'ai intérêt à les augmenter d'un quart d'ici là, et je n'aurai ensuite qu'à les faire rabaisser à leur niveau actuel). En France métropolitaine, l'application des acquis du LKP engendreraient certainement toutes les dérives possibles en terme de fraudes aux contrôles des prix ou d'accélération du chômage...

Pour ce qui est du Front de Gauche, les connaisseurs de ce blog savent ce que je pense du mythe de "l'Europe sociale".

Les (quelques) lecteurs, s'ils sont attentifs, auront remarqué dans la bannière de ce blog la disparition de la mention "non marxiste" de ces pages ainsi que la promesse de reparution du site en Avril. Je tâcherai de tenir cette promesse.

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29 janvier 2009 4 29 /01 /janvier /2009 23:42

      
Au centre de la photographie, avec un bonnet andin, Etienne, coordinateur des JC du 92. Tu dois le vénérer.


29 Janvier 2009

J'ébauche une fois de plus un article en vitesse afin d'éviter la déportation en Sibérie : de retour de la manifestation parisienne entre Bastille et Opéra, je voudrais d'abord aborder deux points:

       - la mobilisation a été puissante, les services de police reconnaissant au moins 700.000 manifestants en France, et les syndicats en dénombrant 2,5 millions. Ce qui nous ramène à la glorieuse époque de la lutte anti-CPE, lutte dont j'ai réalisé mieux encore qu'avant l'importance en Décembre dernier : imaginez si nous avions dû supporter des contrats incluant deux ans de période d'essai...

        - pendant les jours qui ont précédé le 29 Janvier, on a encore entendu les traditionnels discours contre "la France, championne de la grève"...ce qui est un mensonge. En France, les grèves sont fortement médiatisées, et reprises à l'étranger pour dénigrer la France. En réalité, si l'on mesure le nombre de jours de grève dans l'année rapportés à la population active, des pays tels que l'Espagne, l'Irlande ou des états d'Europe du Nord n'ont rien à nous envier, et nous dépassent dans plusieurs cas. Les derniers chiffres dont je dispose datent de 2001, et montraient autant de jours de grève en Espagne qu'en France (1,8 million de journées dans les deux pays) alors que la population active française était numériquement supérieure à celle de sa voisine ibérique.

        Sinon, remarquons que l'intérêt des manifestations est aussi d'être un vaste forum (au sens d'une collection de tribunes, pas d'un vrai débat) où de nombreuses organisations peuvent se faire apercevoir, quelques soient leurs qualités. J'ai donc, comme pour chaque manifestation que j'ai faite à Paris, collectionné quelques tracts -pas mal en fait - que je commenterai demain.

        Pendant ce temps, intermède poétique :

"Carla,
Carla,
on est comme toi,
on s'est fait baiser par le chef de l'Etat ! !"

 
30 Janvier 2009


         Commençons donc notre tour des tracts.


Luttes professionnelles / collectives :

 

          Le Mouvement de la Paix distribuait un appel à la réduction des dépenses militaires françaises, en progression de 5,4% dans le budget 2009, au contraire des budgets sociaux. C'est là une revendication permanente de ce mouvement, ce qui ne le dispense pas de veiller à son arithmétique, notamment lorsqu'il affirme que "2 milliards d'euros" financeraient une augmentation de pension de "332 euros par mois pour 5 millions de retraités"...ce qui ferait 4000 euros par an, soit 20 milliards d'euros pour 5 millions de personnes. Ce qui rappellait aussi la réclamation d'une hausse de 300 euros nets sur tous les salaires, soit 3600 euros pour plus de 20 millions de salariés...donc au moins 72 milliards d'euros. Ces deux mesures représenteraient autant que l'ensemble des dividendes versés à des ménages en France. Ce n'est pas qu'il faille les condamner, mais leur application demanderait un changement de système : si l'on réquisitionne toutes les dividendes, il faut réquisitionner l'essentiel des entreprises privées. Ces mesures présentées comme de simples mesures d'urgences "antilibérales" demanderaient un véritable programme communiste, et c'est là la faille de l'antilibéralisme (voir l'article "Misère de l'antilibéralisme" dans ce blog).


          Un intéressant dépliant de "France Terre d'Asile" rappelle la situation de centaines de réfugiés d'Afghanistan, d'Iraq ou d'autres pays, qui se retrouvent dans la plus grande clandestinité en France parce que leur demande d'asile, pourtant compréhensible par la situation de leur pays natal, a été réfusée. Et ce plus particulièrement en raison d'un règlement européen, dit "Dublin II", par lequel les gouvernements de l'Union ont accepté que la demande d'asile d'un réfugié entrant en Union Européenne soit traitée par le pays où il est entré. Ainsi, un réfugié du Moyen-Orient entrant en Grèce pour se rendre en France devra attendre l'avis de la Grèce...qui, comme par hasard, est beaucoup plus restrictive que la France, ce qui lui pose peut problème, dans la mesure où les réfugiés migreront clandestinement vers d'autres pays que la Grèce. Qu'il y ait une coordination en matière de droit d'asile entre pays européens est une chose, mais c'est à la France de décider d'offrir l'asile, surtout à ceux qui sont de fait sur son sol !


         Plusieurs coordinations et collectifs nationaux (contre les franchises médicales, pour les hôpitaux et maternités de proximité, pour le service public) ont diffusé un document qui, parmi d'autres, combattait la loi Bachelot qui va s'attaquer à l'hôpital.  Cette loi vise à réformer le "management" des structures hospitalières en les régionalisant, au prétexte de lutter contre des maux connus de l'hôpital en France : cloisonnement et parfois redondance des services, surinvestissements (compensés par des pénuries de moyens)...et ce notamment en créant les ARS (Autorités Régionales de Santé, qui en réalité sont dans les projets des gouvernements depuis Juppé). Le texte dénonçait les manques de moyens, les regroupements d'établissements qui mèneraient vers des "usines à soins publiques", laissant les prestations haut de gamme au privé. Le tract s'attaque à la tarification à l'activité (T2A), qui "favorise les cliniques privées lucratives". Il manque cependant une définition de la T2A : pour faire simple, le principe de la tarification à l'activité est de calculer pour chaque établissement hospitalier une somme de "points ISA", points qui sont attribués à chaque fois que l'établissement traite une pathologie particulière (chaque pathologie étant coefficientée) sur un nombre donné de groupes homogènes de malades. Le but est de comparer cette somme de points avec les dépenses de fonctionnement de l'établissement, et de déduire combien d'euros sont dépensés par point ISA. Plus un établissement est économe, plus il peut négocier des moyens supplémentaires. Dans ce contexte, les cliniques qui réalisent des traitements de pointe tout en comprimant les dépenses salariales sur les infirmières et administratifs sont gagnantes. L'absurdité est surtout de valoriser les hôpitaux qui font le plus d'activité, alors qu'une priorité devrait surtout être d'encourager la connection entre hôpital et médecine de ville pour prévenir les maladies et accidents. Un hôpital qui remplirait ce rôle avec l'aide de personnels spécialisés en prévention (donc qui ne réaliseraient pas de "points ISA" puisqu'ils ne font pas de soins) et qui de ce fait réduirait son activité curative devrait être récompensé, et non dévalorisé. Pour aller vite encore, une vraie réforme de gauche devrait élaborer une surveillance, pour le secteur hospitalier et de ville, des résultats sanitaires de l'ensemble de la population sur un territoire, récompenser en priorité la réduction des mortalités (infantiles, générale, accidentelle, liée à des pathologies lourdes, etc...), la prévalence des maladies, et en second lieu la réduction des coûts.


         Un tract FO critique également la loi Bachelot, mais sur le sujet du financement de la Sécurité Sociale. Et là, les arguments me plaisent moins. Il est une fois de plus questions des dizaines de milliards d’euros (42 Mrds d’euros selon le tract) d’exonérations sociales qui, si elles étaient annulées, permettraient de faire disparaître le déficit de la Sécu. Je suis mitigé à cette idée d’annuler ces exonérations. Car cela revient une fois de plus à l’idée que pour préserver la Sécu, il faut uniquement prélever plus de cotisations et d’impôts, et pas chercher des dépenses inutiles (et cela existe pourtant : la surconsommation de médicaments est un fait, et parfois elle aboutit à tuer des patients au lieu de les soigner). Aussi, même si l’on pense que les exonérations de cotisations n’auraient pas créé d’emplois, il se peut toujours que leur suppression serve à justifier des suppressions d’emplois par les entreprises. Ensuite, FO critique « l’étatisation » de la Sécu avec des arguments parfois naïfs. Sur le fond, je suis d’accord avec ce syndicat, la Sécurité Sociale devrait être indépendante de l’Etat. Mais il est absurde de dire qu’une Sécu indépendante, en cas de dérive budgétaire, n’aurait pas à être soumise aux mêmes contraintes d’austérité que l’Etat lorsqu’il doit réduire ses déficits. FO dit « [en cas d’étatisation], le budget de la Sécurité Sociale deviendrait comme celui de l’Education Nationale qui supprime des milliers de postes d’enseignants, des milliers d’heures de cours, ferme les classes… ». Et bien justement, il y a déjà des déremboursements opérés par l’Assurance-Maladie, les droits à la retraite sont déjà rognés, pas besoin d’attendre l’étatisation pour ça…

 

        Un autre tract me concerne plus directement en tant que statisticien, c’est celui rédigé par les salariés de l’INSEE en lutte contre la délocalisation de sites parisiens de l’INSEE à Metz. Il ne faut pas voir là un mépris parisien pour la province : les deux tiers des effectifs de l’INSEE sont déjà en région. Il y a effectivement des antennes régionales (comme celle de Nantes où j’avais postulé pour un stage – en vain). Les rédacteurs du tract affirment que les intentions de cette délocalisation sont en fait : 1) de compenser la ville de Metz de la perte d’une caserne ; 2) de provoquer des départs d’experts, qui ne souhaiteraient pas supporter les déplacements fréquents que ce déménagement leur imposerait. De là à penser que c’est la statistique publique qui dérange, surtout en ces temps de crise, il n’y a qu’un pas…

 

        J’ai également pris deux tracts CGT relatant le combat des travailleurs sans-papiers travaillant dans l’intérim, à Paris 10ème et 12ème (chez Adecco et VediorBis). La gauche à Colombes s’est déjà mobilisée pour eux au Printemps dernier (cf. l’article « Il paraît que je vais déclencher une guerre civile »), et leur cause m’apparaît juste. Ces salariés, dont les contrats indiquent souvent qu’ils sont « manœuvres » quand ils travaillent comme électriciens, maçons ou coffreurs, réclament :

-leur régularisation administrative, et la signature de leurs formulaires d’autorisation de travail (CERFA) par leurs employeurs ;

-le soutien des pouvoirs publics ;

-la diffusion de leur communiqué de revendications sur plusieurs médias tels que que Radio France Internationale.

       

         En dernier lieu, et sans doute parmi nombre d’autres tracts que j’aurais pu prendre, un document de la Fédération Nationale des Associations de Rééducateurs de l’Education Nationale, en défense des Réseaux d’Aides Scolaire aux Elèves en Difficulté (RASED). J’avais déjà mentionné leur cause dans mon article d’Octobre sur la manifestation pour l’éducation, je ne peux que vous recommander de lire leur texte sur :

http://rased-en-lutte.net/2008/11/manifeste-du-comite-scientifique-de-la-fnaren/

 

Les organisations politiques

 

            Beaucoup de tracts de revendications faits par diverses formations étaient, comme à l’habitude, disponibles. Les élections européennes nous donneront l’occasion de reparler du NPA, du PCF et du Parti de Gauche.

 

            Intéressons-nous à quelques organisations de plus petite taille. D’abord, un tract d’Alternative Libertaire, qui nous explique que cette crise n’est pas une erreur du capitalisme (en effet), que l’Etat défend la propriété capitaliste et qu’il est illusoire de lui faire confiance pour changer la société (ce qui est cohérent pour des anarchistes)…mais que les travailleurs doivent « remettre en cause la rémunération du capital en commençant par les entreprises qui font du profit ». A noter que la collectivisation des entreprises n’est pas demandée, d’autant qu’il faudrait que la puissance de l’Etat défende la propriété collective. Les revendications concrètes sont connues : retraites à 37,5 annuités pour tous, réquisition des logements vides, semaine de 32 heures et droit de veto sur les licenciements collectifs. Or, pour garantir ces nouveaux droits, il faut…un état. La lutte des travailleurs peut bien des choses, mais ce sont les institutions qui sont les gardiennes du droit. On est donc surpris de cette confusion entre mesures réformistes et discours anarchistes…Ces libertaires là posent beaucoup de nouvelles règles et d’interdits !

 

            Vient encore un tract de la fédération de Paris du MRC (le parti de feu –ah non ? – Chevènement), qui affirme que l’Union Européenne est en « faillite » (pas encore, mais on aimerait bien…) et appelle donc « à l’Europe des peuples, des projets, des coopérations… ». L’alter-européïsme ne mange pas de pain.

 

            L’article étant déjà long, je ne m’attarderai pas non plus sur un dépliant du M’PEP (Mouvement Politique d’Education Populaire, de Jacques Nikonoff), qui réexpose un programme qui rappelle encore le triste antilibéralisme : « Sortons du capitalisme ! » par des hausses d’impôts, par le protectionnisme, par la suppression des marchés financiers…Enfin bref par un retour à un capitalisme gaullien semi-autarcique. Je ne regrette pas, parfois, de manquer d’éducation (populaire)…

 

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